SARAYAKU, le peuple du Milieu du Jour
Sarayaku, le 5 décembre 2013
AUX CITOYENS DU MONDE ENTIER
LETTRE DE SOLIDARITÉ À LA FONDATION PACHAMAMA
De la Forêt profonde, le Peuple Originaire Kichwa de Sarayaku, dans son droit légitime, se solidarise de manière large et permanente avec la Fondation Pachamama. Il reconnaît le travail déployé par elle en faveur des Droits de l’Homme et de la Nature, clairement et solidairement exprimé dans l’appui fourni à Sarayaku au cours des dix dernières années dans le déroulement et le jugement du “Procès de Sarayaku contre l’État de l’Équateur“.
Sarayaku condamne et rejette totalement la décision unilatérale et violente adoptée par le Gouvernement national de dissoudre la Fondation Pachamama, à l’encontre de ce qui est établi par la Constitution de l’État.
Nous soulignons que, dans l’histoire des peuples indigènes, jamais l’État et les Gouvernements successifs n’ont favorisé ni appuyé le renforcement de notre organisation. Nos institutions, notre gouvernance, nos plans de vie, la gestion du territoire ainsi que les thèmes collatéraux n’ont jamais été leur préoccupation, étant donné qu’il était nécessaire que, pour améliorer nos conditions de vie, nous devions réaliser une autogestion large et hardie.
Dans cette perspective, la Fondation Pachamama appuyait les droits fondamentaux des sans voix en encourageant la gouvernance et en renforçant la capacité de s’organiser, de gérer le territoire et de préserver la biodiversité. Ce qui revient à assumer les obligations dont l’État doit s’acquitter de manière permanente dans les affaires publiques en faveur du véritable exercice de la démocratie et du développement.
La dissolution de la Fondation Pachamama répond à l’intention de faire taire la voix des peuples face à l’extractivisme destructeur, elle répond aussi à la crainte que nous, ces peuples, nous nous organisions pour exercer notre autodétermination, crainte également que nous réclamions nos droits en proposant de décoloniser et de combattre le racisme qui règne depuis l’esprit colonial.
Du critère raciste naît l’idée qu’ « un Indien instruit est dangereux », raison pour laquelle on veut à tout prix empêcher, isoler, intimider, afin que les organisations des Droits humains solidaires abandonnent tout type de soutien au processus de consolidation de la voix et de la force des nations autochtones.
Ce qui s’est produit le 28 novembre dernier est le résultat d’une action nettement injuste, provoquée au niveau même d’un gouvernement qui ne respecte pas les droits des peuples indigènes à la consultation préalable, libre et informée de bonne foi, mais qui attente à leur patrimoine de connivence avec de faux leaders expulsés de leurs territoires et qui ont toujours eu la mauvaise habitude de recevoir de l’argent facile, prétendument pour leurs peuples et la vie de leurs habitants, mais avec des mensonges et tromperies pour favoriser de grandes entreprises destructrices de la nature.
Pour le peuple de Sarayaku, la valeur de la justice a ses racines dans son souci absolu d’équilibre et d’impartialité ; elle ne doit pas seulement établir la matérialité des faits, mais aussi trouver l’origine du problème et de la provocation afin de démontrer la responsabilité des véritables auteurs de cette situation chaotique, alors qu’au contraire les vrais coupables sont libres et rendent des jugements qui leur conviennent. Dans cette perspective, ce sont l’État et le Gouvernement qui sont les seuls responsables.
Pour ces raisons, nous rejetons catégoriquement la décision et nous rendons l’État responsable de toute action psychologique, physique et morale qui pourrait affecter les membres et les leaders de Sarayacu ainsi que de la Fondation Pachamama.
Nous faisons savoir que nous veillerons à dénoncer toute infraction ; nous demandons que la justice montre son vrai visage et que soit restituée immédiatement la légitimité institutionnelle de la Fondation Pachamama.
Pour le Peuple de Sarayaku,
José Gualinga
Tayak Apu (Président) de Sarayaku
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